Dom La maison íà ôð. ÿçûêå

Ñàøà Âàëåðà Êóçíåöîâ
"Dom/La maison" íà ôð. ÿçûêå
3 ñåíòÿáðÿ 2014 ã. â 14:38
Àðêàäèé Ñëàâîðîñîâ
Ñàøà Âàëåðà Êóçíåöîâ
Dom/La maison

Sc;nario du film
      Le panorama de Moscou ; vol d'oiseau, le soleil brille, on n’aper;oit  ;me qui vive. Pas de mouvement, pas de bruit dela ville. La nudit; des  ruines. Apr;s la rivi;re, le Kremlin, solennel et hostile, les lueurs  mortes des coupoles.L'alignement des fen;tres. Par ci par l;, dans les  ruelles, les autos immobiles, comme abandonn;es pour toujours. Un  crid;nu; de tout sens, terrifiant, monotone, se fait entendre  r;guli;rement derri;re lesmaisons, c'est l’unique son d;chirant le  silence.
     Laperspective d’une rue vide, inond;e par  la lumi;re du soleil. Pr;s de la ported’une maison, on voit une chaise  renvers;e et, ; c;t;, un basset (chien ?) en caoutchouc, oubli; par un  enfant (ouabandonn; en h;te) et portant cette inscription faite avec un  stylo ; bille :“Marouska”-“Màðóñüêà”.
     La stationde  chemin de fer «Moscou-Triage»-«Ìîñêâà ñîðòèðîâî÷íàÿ». Les rails, les  c;bles entrelac;s, les signaux lumineuxaveugles. L’espace mort et froid,  balay; par le vent.
     Le tunnel rev;tu de carreaux  d’un passagesouterrain, sale et mal ;clair;. Le fort courant d’air fait  voler les morceaux de journaux et d’affichesqui se collent aux murs. Une   inscription au charbon sur une des parois: «L’amour est la seule chose  dont nous avons besoin!» Des d;chets roulent sur l’asphalte noir,  emport;s par le vent. Une silhouette projetant une longue ombre appara;t  tr;sloin, au fond du tunnel.
     Un silence profond.  Rien qu’un l;ger bruissement de l’eau qui coule. La petite  rivi;reau-dessus de laquelle plane une brume myst;rieuse (fantastique?).  Les branches de buissons sur la rive, plus loin, le champ automnal,  plus loin encore, sur la pente d’unecolline, on voit des silhouettes  sombres de maisons, peut-;tre un village, peut-;tre des maisons de  campagne. Le ciel est charg; de nuages.
VOIX DE FEMME: Que c’est calme ici.
VOIX D’HOMME : Ouais... Comme si nous ;tions d;j; morts.
On  entend le rire forc; ou le sanglot de la femme. En aval, un tronc  d’arbre enjambe la rivi;re. Un homme, frisant la trentaine, dans une  vielle capote sans ;paulettes, passe sur le tronc; il est suivi d’une  jeune fille dont la t;te est envelopp;e d'un ch;le ; la mani;re des  vieilles femmes.
Le sentier, entre les sapins. Ils marchent sur  lesentier – lui, l’homme aux cheveux longs, ramen;s derri;re la t;te et  cach;ssous le col de la capote, et elle, la jeune fille avec un sac en  bandouli;re.
LUI : Laisse ;a, arr;te. Tout s’est  arrang;, Dieumerci. Tu entends ? H; ! Nous avons bien r;ussi ; ;chapper ;  ces abrutis. Toutest de la merde, maman! Est-ce encore loin?
ELLE : Non. ;a doit ;tre tout pr;s.
Ils  sortent sur un chemin vicinal boueux et longent, sans regarder sous  leurs pieds, les palissades derri;re les quelles se cachentles maisons  de campagne ; on voit ; c;t; la sombre silhouette d’une cabine  t;l;phonique.
ELLE : La voil;.
Une  maison en bois ; un ;tage,  humide, avec une v;randa dont les fen;tres  sont condamn;es avec des planches, se d;tache sur unfond lugubre  derri;re les arbres dont les cimes bruissent quelque partau-dessus des  t;tes.
LUI : Alcatraz !
En  s’entraidant, ils escaladent la palissade. Ils marchent entre les sapins  dans uneverte clairi;re, se dirigeant vers la maison.
ELLE  : ... On vivra quelque temps ici, d’accord? En attendant que tout  s’arrange l;-bas.C’est chic ici, il n’y a personne. Tout finira par  s’arranger, n’est-ce pas? Tout s’arrangera ; la fin?
Sans  r;pondre, il monte sur le perron. Il s’arr;tedevant la porte. Une cl;  rouill;e est dans la serrure. Un chat aux poils touffus et  emm;l;s surgit de l'arri;re de la maison, les regarde fixement et se met  ; miauler tr;s fort, sans d;tacher son regard. Apr;s avoir un peu  h;sit;, il tourne la cl; avec effort. Ils entrent dans la maison. La  jeune fille entre dans la petite cuisine et allume la lumi;re. L’homme  marque un temps d’arr;t sur le pas de la porte: un r;frig;rateur tout  ;rafl;, une cuisini;re ; gaz salie par des blattes. Sur la table,  quelqu’un a laiss; une touffe de cheveux noirs.
L’escalier menant au premier ;tage.
Les  portes, lescl;s dans toutes les serrures. Elle ouvre les portes, il  monte au premier ;tage. Une grande chambre claire donnant sur un large  balcon. Une garde-robe,un lit bas, ; son chevet, une lampe avec un  abat-jour en jonc. Ils regardent autour d’eux. L’homme ouvre la porte du  balcon, des sapins sont ; la port;e de la main, derri;re euxle ciel  bleu.
ELLE : C’est l; que nous suspendions notrebalan;oire.
Le bruissement des sapins, pas d’autre bruit. Unsilence extraordinaire.
Le  chat hurle quelque part en bas. Soudain, uneporte claque. L’homme se  tourne vers la jeune fille qui(mais) r;pond par une question: «Qu’est-ce  que c’est?»
LUI : Des rats. (Et)tu pensais quoi ? Des  fant;mes ? Des esprits de morts ? Tu croyais qu’il n’yavait personne ici  ? La maison est d;j; occup;e.
Il s’est tourn; vers elle et un sourire ;trangeeffleure ses l;vres.
LUI  : Bon, ;a va, n’aie pas peur. Mieux vaut fermer tout en bas et vivre  ici. Ilsne monteront pas au premier. Les rats ont le mal d’altitude, en  haut, la t;teleur tourne, une des tares de leur d;veloppement  intellectuel.
Il est revenu dans la chambre, a sorti  sur le balconle fauteuil de jonc et, renvers; sur le dossier, il a  fourr; la main dans sa poche ; la recherche des cigarettes. La jeune  fille a esquiss; un sourireh;sitant et est revenue dans la chambre. Pour  rendre la chambre plus confortable, elle nettoie la poussi;re, remet de  l'ordre. Elle ouvre la garde-robe et y voitune robe chiffonn;e d’un  rouge ;clatant. Elle la prend, la regarde, l’essaye,en se mirant dans la  glace qui est pr;s du lit. Seules ses jambes s’yrefl;tent, la jupe  tomb;e sur ses pieds jette un brusque ;clair rouge dansl’espace refl;t;.  ;a lui pla;t. Elle joue devant la glace, fait des pas d’unedanse  quelque peu somnambulique...
L’homme s’est abandonn;  dans le fauteuil, la capoteest jet;e sur ses ;paules. Il siffle, mais  aucun son ne sort de sa bouche. Puisil sort de sa poche un petit paquet  envelopp; dans une feuille m;tallique et led;fait, c’est un  morceau de  marijuana. Il ;te le tabac d’une cigarette.Il sort son couteau et se met  ; hacher la marie-jeanne.
La jeune fille danse seule  dans la chambre. Elle s’arr;te, en voyant son ami se tenir sur le pas de  la porte avec la cigarette bourr;e de marijuana dans la bouche, elle la  regarde avec ravissement. Ils’approche d’elle, l'enlace doucement d’une  main et de l’autre lui met la cigarette entre les l;vres. Elle tire une  bouff;e en renversant la t;te.
Ses longs doigts  touchent l;g;rement le galbe de seshanches, suivent le contour de son  corps. Sur le plancher – la t;che d’un rougecriant de la robe. Fourrure,  mouvements saccad;s, respiration, murmure.
ELLE: Encore… Que c’est bon. C’est bon. N’est-ce pas?
LUI: Le bonheur est meilleur. Le bonheur est unfusil qui garde encore sa chaleur. Pif! Paf!
ELLE: Avant tu ;tais pacifiste.
LUI:  Ouais. Et avant, bien avant, j’avais les branchien. M;me maintenant  d’;tranges images mehantent. J’ai notamment l’impression que nous sommes  couch;s nus dans unevieille maison dans une for;t au bout du monde,  fumons de l’herbe et... et je m’en fous de la v;rit; car le bonheur est  meilleur. Je n’ai pas besoin de la v;rit; nue, ce qu’il me faut c’est le  bonheur nu!
ELLE: Et toi, tu es mon Roi nu. Permettez-moi detirer encore une bouff;e, Votre Majest;.
LUI: Quant aux rois, Andy Russell a ;crit des choses chics sur eux. Je te les lirai un jour, si on en a le temps.
ELLE:  Il n’y aura plus de temps. J’en ai ras lebol. On entend dans tous les  coins de l’espace le tic-tac de cette machine infernale.
LUI: Et ensuite « bang » ! Une grande explosion ettout repart ; z;ro.
ELLE: Je ne veux pas d’explosion. Je ne veux rien. La seule chose que je veux...
LUI:  Voil;, comme ;a, comme ;a... (Ayant pris la cigarette ; l’envers, elle  lui insuffle la fum;e ; il la respire longuementet l;g;rement, en  fermant les yeux). Encore… Je ne veux rien non plus. (Il serenverse sur  le lit). J’ai tout ce qu’il ne faut. Tout et encore une bouff;e et  demie.
ELLE: Que c’est bon, mon Dieu. Nous sommes  enfinchez nous. On marchait, on marchait, on fuyait et voil; que...  C’est maintenant notre maison, tu vois?
LUI: Rien de  plus facile pour nous de construireune maison... Car la maison n’est que  dessin;e. Peut-;tre sommes-nous aussidessin;s?  m’en irai pas.  D’ailleurs,nous n’avons nulle part o; aller…
ELLE: Non, moi, je ne suis pas dessin;e, c’est s;r. Voil;, regarde, regarde... Faut dire que toi non plus...
LUI:  Tu y vas fort, ma petite... Oui, il para;t quenous ne sommes pas  dessin;s. Alors, on est de nouveau dans l’erreur. On n’est pas des  tao;stes pour vivre dans des palais dessin;s.
ELLE:  tao;stes, tao;stes!! Je ne veux plus rien ;couter. C’est notre maison ;  nous. Je ne m’en irai pas. D’ailleurs, nous n’avons nulle part o; aller…
LUI: Oui. Peut-;tre c’est ;a la libert;...
Dehors,  il fait nuit noire. Dans la vitre de la porte du balcon, au-dessus des  sapins, on voit les ;toiles d’une nettet;  extraordinaire.
       A l’aube, le bruit au rez-de-chauss;e l’ar;veill;, il a tendu  l’oreille. Quelqu’un marche. Une chaise est tomb;e. On entend des voix  indistinctes. Ensuite, le silence est revenu. Il s’est lev; doucement  pour ne pas r;veiller la jeune fille, est rest; un moment immobile, a  sorti son couteau de la poche de lacapote, l’a mis dans la  poche-revolver de son blue-jean et s’est mis ;descendre l’escalier, les  pieds nus, en essayant de ne pas faire de bruit. Au rez-de-chauss;e, il  s’est approch; de la porte derri;re la quelle un bruit indistinct s’est  fait de nouveau entendre. Il l’a entrouverte avec beaucoup depr;cautions  et a jet; un regard ; l’int;rieur. Au m;me instant, il l’a referm;et,  d’un mouvement fr;n;tique, a tourn; la cl; dans la serrure. Il  s’estimmobilis;, tendant l’oreille.
     Le matin. La jeune fille ouvre les yeux. L’homme, d;j; habill;, est assis pr;s du lit, leregard plong; dans le vide.
ELLE: Qu’est-ce qu'il y a?
LUI: La nuit, quelqu’un a march; en bas.
ELLE: ???
LUI: Oui. ;a a dur; tr;s longtemps. Ensuite, on a bredouill;, jur; et fait la noce, je crois.J’ai ferm; la porte ; cl;.
La jeune fille, toute tendue.
ELLE: Je ne descendrais plus au rez-de-chauss;e.
LUI:  J’ai d;j; bien r;fl;chi ; tout cela. Nous ne descendrons plus. On a  assez de bouffe et les chiottes sont au premier (il a essay;de sourire),  sur ce point on a de la chance.
ELLE : Et si ce ne sont que tes fantasmes?
LUI  : Pour le moment, tout va bien avec ma t;te.J’ai bien entendu des  bruits. Hier, nous avons fum; tr;s peu. Tu crois que je n’arrive plus ;  distinguer une hallucination de la r;alit;?!
Il est  allong; sur le lit et, un harmonica ; labouche, joue une m;lodie  (triste? d;chirante?). La jeune fille, portant un plateau, entre dans la  chambre, commence ; arranger la vaisselle sur la petite table  m;tallique munie de roues, destin;e d’habitude ; servir des petits  d;jeuners raffin;s.
LUI : Pas la peine, je n’ai pas faim.
Il  repose l’instrument, allume une cigarette. L'air vex;, elle se met ;  manger, avec une cuill;re de bois, la soupe gris;tre, pr;par;e ; base de  conserves. L’homme pr;te l’oreille, elle s’efforce de manger sa soupe  sans faire de bruit.
     Le jour. Dans la petite pi;ce  contigu;, la jeune fille fouille dans les tiroirs d’une commode, en  retenant sur ses genoux le blue-jean de son ami. Sur la commode – un  tr;s vieux poste de t;l;vision, recouvert d’une couche ;paisse  de  poussi;re. Dans la vitre de la porte, on voit une partie de la chambre,  il est assis l;, les pieds sur untabouret. D'un air lugubre, il secure  les ongles avec son couteau.
ELLE: Regarde, il y a des  bougies ici, elles pourront nous servir encore. Et voil; des fils ;  coudre. On trouve de tout danscette maison. ;a va, tout finira par  s’arranger. En tout cas, dans la ville, c’est plus dangereux, n’est-ce  pas? Oh, quel truc, ;a sert ; quoi ? Nous resterons ici, invisibles, en  attendant que tout s’arrange. Attention, lessouris, le chat vient ici...  Chassons les chats! Les chats, go home ! D’accord? On va fumer,  regarder par la fen;tre, ;couter la neige tomber et ne penser ;rien. Une  idylle, n’est-ce pas? Avant de nous coucher, je te lirai Dickens  ou Sade... Voil;, j’ai trouv; (elle sort d’untiroir un morceau de tissu,  l’ajuste au blue-jean). Je te le rapi;cerai. Regarde, ;a va?
Elle se tourne vers la porte. Il n’y a personne dans la chambre.
L’homme,  en cale;on, est dans l’escalier. Il fait plut;t froid: Tendu, il ;coute  attentivement ce qui se passe derri;re laporte ferm;e ; cl;. Le silence  semble tangible et en mouvement. Il monte l’escalier sur la pointe des  pieds et ferme derri;re lui la porte du premier. Il arrive avec  difficult; ; faire jouer la cl; dans la serrure. Il tourne la t;te: la  jeune fille, le blue-jean ; la main, est sur le seuil de la chambre,  elle le regarde en silence.
     Le soir. Les sons de l’harmonica.
VOIX DE LA JEUNE FILLE: Regarde, il fonctionne.
Elle  est devant le poste de t;l;vision. On voit l’;cran s’;clairer. Le  speaker explique quelque chose aux spectateurs dans le langage destin;  aux sourds-muets. Pas de son. L’homme entre dans la chambre. Ses cheveux  sont ramen;s en arri;re. Il s’assied sur le plancher et regarde  l’;cran.
LUI: L’univers est grand, mais pas d’endroit o; l’on puisse s’isoler.
Il  se l;ve et sort. Quelques secondes apr;s, il r;appara;t avec une barre  de fer ; la main. Tr;s paisiblement, il tape sur le poste de t;l;vision.  Une explosion. De la fum;e. La jeune fille crie. Il retire avec force  le fil ;lectrique de la prise.
LUI: Ils m’ont eu m;me  ici, salaud s! Y aura plusde journaux t;l;vis;s, le protoplasme pourri  et puant en fermentation, je vous ;chapperai malgr; tout, droitiers,  gauchistes, blancs, rouges! Bourreaux etvictimes, ;a revient au m;me,  deux faces d’une m;me chose! Je n’y suis pourrien! Je ne veux pas  choisir, je n’ai pas besoin de leur produit, ils me proposent – ; moi!  Le libre choix, mais mes illusions me sont plus ch;res quevotre r;alit;  convertible!
L’homme se d;m;ne dans la chambre comme dans une  cage, ouvre et referme avec bruit la fen;tre, frappe du pied le poste  fumant. La jeune fille glisse le long du mur pour s’affaisser sur le  plancher, suit des yeux tous ses mouvements, doutant qu’il ait toute sa  raison.
LUI: Ils veulent bien nous bouffer tous, nous  faireune lobotomie... J’ai parfois envie de les prendre en haine, mais  je n’y arrive pas. Qui prendre en haine? Les mutants?! Non, je ne suis  pas un saint. Mais cette odeur infecte me rend fou. ;a pue. Mais ;a ne  fait rien. Je d;gueule, donc je suis. Voil;, je commence d;j; ; parler  avec des slogans.
Il se calme, s’assied ; c;t; d’elle.  Soudain, l’ampoule sous le plafond commence ; clignoter, la lumi;re  vacille et enfin s’;teint.
Les voix dans la nuit.
LUI: Merde!
ELLE: Il y a des bougies dans la commode. Faisgaffe.
LUI: Un instant.
ELLE: Tu as des allumettes?
LUI: Oui, dans ma capote, attends un instant. Silence! Qu’est-ce que c’est?
ELLE: O; ;a? ;coute!
Ils  se taisent. On entend dans le silence quelqu’un marcher d’un pas l;ger  en bas, d;placer des meubles. Une allumette s’en flamme, la jeune fille  allume une bougie.
ELLE: Tu as entendu quelque chose ?
LUI: Et toi?
      La nuit. La bougie, pos;e sur legoulot d’une bouteille, br;le au chevet  du lit. Ils sont allong;s, ; demi-v;tus, sous la couverture, leurs yeux  sont ouverts. Le regard de l’homme est vide et fixe; la jeune fille est  couch;e sur le flanc et fixe le mur. En bas, on entend de nouveau un  bruit indistinct, un tintement de verre, quelqu’un glapit. L’homme,  h;sitant, sort du lit, s’approche avec pr;caution de la porte, la ferme  vite. Ensuite, il apporte labarre de fer et essaie de la mettre dans la  poign;e de la porte. La jeune fille, les cheveux ;bouriff;s, en chemise  sur le corps nu, s’approche de luisur la pointe des pieds, essaie, non  sans maladresse, de l’aider. ;clair;s par la lumi;re oblique de la  bougie, ils semblent apeur;s et pitoyables.
     Le  matin. L’homme est sur le balcon. Il regarde tristement les cimes de  sapins, mordilleune allumette. Il crache et se met ; pisser en bas,  par-dessus la balustrade.
Le jour. La chambre. La jeune  fille confectionne desbracelets avec des graines de verre. La barre de  fer est toujours dans lapoign;e de la porte. L’homme revient dans la  chambre, s’allonge sur le lit etse met ; feuilleter un livre ;pais avec  une couverture de samizdat.
ELLE: Voil;…
Une pause…
ELLE: Est-il possible qu’ils ne nous laissent pasen paix m;me ici? Peut-;tre tout finira par s’arranger?
LUI:  Voil;, ;coute. C’est trop beau? mais vivent dans meilleures conditions.  Il lit: "Toutun chacun peut monter sur le tr;ne et s’affubler de la  couronne. Mais ce n’estque le Roi qui peut quitter le tr;ne et rendre la  couronne. L’exil est la Patrie des Rois". (Il a un sourire ironique).  Nous sommes donc dans notre Patrie.
Il se l;ve, s’approche de la fen;tre.
LUI:  Et malgr; tout, je voudrais monter dans un train sans payer ma place et  foutre le camp d’ici... Pardon, mais je ne trouve pas d’autres mots. Et  je n’en trouverai pas.
La jeune fille fume en silence,  en regardant par la fen;tre. Le soleil se couche. L’homme est assis sur  le plancher, il joue avec la corde au «berceau du chat», il le fait  machinalement mais rythmiquement. Un, deux, encore une fois. La jeune  fille feuillette le livre ;pais. L’homme sel;ve, s’approche de l'armoire  et commence ; la pousser vers la porte pour la barricader.
      La nuit. L'armoire est secou;e par lescoups venant du dehors. Des cris  horribles et indistincts se font entendre derri;re la porte barricad;e.  Des coups sourds ;branlent la maison. La jeune fille regarde la porte  sans en d;tacher les yeux, ses l;vres remuent.
ELLE:  (murmure) : Seigneur, sauve-moi et prot;ge-moi. Sainte Vierge, aide-moi,  s’il Tepla;t... O; puis-je trouver refuge ? Seigneur, apprends-moi ;  prier... Prie Toi-m;me dans mon sein...
Dans l’autre  coin de la chambre, tournant le dos ;la jeune fille, l’homme se tient,  pench; sur la glace, il fait des gestes quise veulent magiques. Elle se  tait et se tourne vers l’homme.
ELLE: Que fais-tu l;?
Il  tourne vers elle son visage, extr;mement bl;me, maquill; comme celui  d’une femme, ce qui le hautain ou tout simplement d;nu; de vie. Il  approche l’indexdes l;vres.
LUI: Chut!
Soudain,  il commence ; chanter ; mi-voix avec lem;me enjouement d;nu; de vie, en  tapant du pied, puis en esquissant des pas dedanse, puis assis sur le  lit etse levant ensuite (s’;tantlev;), comme pris de folie.
LUI (en allemand):
Pauline war ein Dame
Ein Dame, ein Dame
Ein dar pikante Dame
Ein Dame zur Plezir
Da Vaden die Sifone
Sifone, Sifone
Da Vaden die Sifone
Sifone zur Plezir
Zum-zum.
Au  d;but, la jeune fille s’immobilise, ;bahie, puis elle (ensuite,) se  jette sur (vers)lui en sanglotant, encercle sa poitrine et se met ; le  secouer  en criant.
ELLE: Il est devenu fou, cr;tin !  Il se passe des chosestout autour et lui, il fait le con, cabotin,  dingo, cingl;, sinoque... J’aipeur moi, j’ai peur...
LUI: J’ai peur aussi.
Il s’;carte, efface avec son mouchoir la mauvaise plaisanterie. Une petite blague.
Les  bruits et le balbutiement indistinct s’apaisent, se retirent en bas,  dans les pi;ces du rez-de-chauss;e. La jeune fille enfouitson visage  dans les genoux de l'homme, celui-ci caresse doucement ses cheveux, le  regard plong; dans le vide.
LUI : Excuse-moi, ma petite, excuse-moi...
Ils sont toujours dans la chambre, d’une main, il lui caresse les cheveux, de l’autre, il v;rifie si son couteau est ; sa place.
      L’aube. Apr;s la nuit blanche, transis, ils sont assis sur le balcon.  Le sac est pr;s d’eux, sur le plancher. Il porte sa capote.
ELLE: C’;tait notre dernier refuge. O; aller maintenant?
LUI: Droit devant nous, le monde est grand. Bon, jedescends, il est temps.
Il enjambe la balustrade du balcon.
ELLE: Combien de temps encore serons-nous forc;s demener cette garce de vie?
LUI: Jusqu’; la fin de nos jours, ma petite.
Un  sourire ironique aux l;vres, il dispara;t derri;re la balustrade. Il  descend en mettant le pied sur les panneaux de contre-plaqu;. Il apporte  une ;chelle. La jeune fille descend l’;chelle. Il s’en va sans se  retourner. Elle court pour le rejoindre, puis s’arr;te et se tourne vers  la maison. Elle la regarde. Elle l;ve la mainet esquisse un singe de  croix ou ungeste d’adieu.
F I N